Mieux protéger le personnel des plateformes, en Suisse aussi!
Le problème est également connu en Suisse: les entreprises dites «de plateforme» comme le service de taxi Uber ou le coursier Uber Eats recourent depuis des années au travail au noir systématique en faisant travailler leurs employé-e-s comme de faux indépendants. Cela signifie que les employé-e-s d'Uber ne sont pas enregistrés auprès des assurances sociales, ne disposent pas d'une assurance-accidents et ne reçoivent pas les salaires habituels dans la branche. Cela a aussi pour conséquence que les centaines d'entreprises dans les secteurs des taxis et de livraison de repas qui respectent les règles ne sont plus en mesure de survivre.
Des années de procédure juridique, mais aucun progrès
Les chauffeuses et chauffeurs Uber ont dû mener des années de procès pour faire valoir leurs droits. D'une part avec succès: le Tribunal fédéral a clairement décidé qu'Uber est l'employeur de ses chauffeuses et chauffeurs et que l’entreprise doit respecter toutes les obligations qui en découlent. Mais d'un autre côté, Uber se moque de toute décision de justice et continue d'évoluer dans l'illégalité. Les autorités suisses compétentes pour contrôler que les lois sur le travail et les assurances sociales sont respectées restent les bras croisés et laissent faire le groupe, à quelques exceptions près.
Un signal important pour une meilleure protection: la Suisse doit suivre cet exemple
La nouvelle directive européenne est donc un signal important: elle responsabilise les entreprises et établit une présomption légale de relation d'emploi pour les entreprises de plateforme, basée sur des critères clairs. Ainsi, les plateformes sont automatiquement qualifiées d'employeurs, sauf si elles peuvent prouver le contraire. En Suisse, les lois existantes suffisent en principe à qualifier les plateformes d'employeurs, mais il manque clairement la volonté politique de faire appliquer les lois et de mettre un terme aux tactiques dilatoires d'entreprises comme Uber. C'est pourquoi une qualification automatique est également judicieuse dans notre pays. Une simple adaptation du Code des obligations permettrait d'ancrer dans la loi une présomption de l'existence d'un contrat de travail. Une telle réglementation rendrait à l'avenir impossible les atermoiements juridiques qui durent des années, aux dépens des travailleuses et travailleurs et des assurances sociales suisses, comme le pratique Uber.
Plus de transparence sur les algorithmes
D'autres dispositions importantes de la directive européenne concernent la transparence et l'obligation de rendre des comptes pour les entreprises lors de l'utilisation d'algorithmes. La Suisse devrait également les reprendre: les employé-e-s ont le droit d'être informés sur le fonctionnement des systèmes automatisés et de contester les décisions (par exemple, la résiliation ou le blocage des comptes). En outre, une surveillance humaine des systèmes automatisés est prescrite afin de garantir le respect des conditions de travail légales.
Critères pour la qualification des plateformes en tant qu'employeurs selon la nouvelle directive européenne (pour être considérées comme employeurs, deux des cinq critères doivent être remplis):
- plafonds applicables à la rémunération que le personnel peut percevoir
- supervision de l'exécution du travail, y compris par des moyens électroniques
- contrôle de la répartition ou de l'attribution des tâches
- contrôle des conditions de travail et limitation de la latitude pour choisir son horaire de travail
- limitation de la liberté d'organiser son travail et règles en matière d'apparence ou de conduite