Uber: l’impunité, c’est fini
Le Tribunal fédéral reste fidèle à sa ligne. Après avoir décidé le 30 mai 2022 de considérer Uber comme l’employeur de ses chauffeuses et chauffeurs en vertu du droit du travail, il constate maintenant de manière définitive que ceux-ci sont également des salarié-e-s dépendants pour ce qui est de la couverture sociale. Uber doit les déclarer aux assurances sociales (AVS, AI, assurance-accidents, assurance-chômage, LPP) et payer les cotisations patronales correspondantes.
Les salaires doivent aussi être payés rétroactivement
Les assurances sociales peuvent et doivent réclamer les cotisations sociales rétroactivement. Les salaires minimums d’existence doivent servir de référence, car le droit du travail n’autorise pas à employer des salarié-e-s sur la base d’une participation au chiffre d’affaires s’il n’en résulte pas des salaires permettant de vivre. Les autres droits des chauffeuses et chauffeurs (salaires, remboursement des frais, droits aux vacances) sont aussi à satisfaire avec effet rétroactif. Selon les estimations d’Unia, Uber doit plusieurs centaines de millions de francs à son personnel. Il est impensable que des milliers de chauffeuses et chauffeurs doivent faire valoir leurs droits individuellement simplement parce que leur employeur refuse de remplir ses obligations légales. Au contraire, une solution collective à l’échelle de la Suisse est nécessaire pour que les chauffeuses et chauffeurs reçoivent l’argent qui leur est dû. Unia attend du Secrétariat d’État à l’économie (SECO) qu’il convoque Uber, les cantons et les partenaires sociaux afin de mettre en place un solution collective imposée à l’entreprise, et qu’il fasse valoir les droits rétroactifs légitimes des employé-e-s.
Il faut suspendre Uber jusqu’à ce que les lois soient respectées
De plus, les autorités doivent faire cesser immédiatement les activités d’Uber jusqu’à ce que l’entreprise se conforme à la loi - c’est-à-dire jusqu’à ce que chaque chauffeuse et chaque chauffeur ait un contrat de travail -, que les salaires et les frais soient réglés conformément à la loi et que l’ensemble du personnel soit déclaré aux assurances sociales. Sans cela, il est à craindre qu’Uber continue à ignorer toute obligation, à employer ses chauffeuses et chauffeurs au noir et à pratiquer un dumping salarial systématique, comme il le fait depuis bientôt dix ans.
La loi sur le service de l’emploi et la CCT s’appliquent à la location de services
Entretemps, Uber a commencé à engager des chauffeuses et chauffeurs par le biais d’entreprises tierces. Il est évident qu’il s’agit d’une location de services, comme l’avait déjà constaté le SECO en 2018, lorsqu’Uber travaillait déjà avec plusieurs «entreprises partenaires». Dans ces cas, ce sont la loi sur le service de l’emploi (LSE) et la convention collective de travail (CCT) de la location de services qui s’appliquent. Dans les rapports de location de services existants, par exemple avec les entreprises genevoises MITC Mobility et Chaskis Rides, de nombreuses dispositions de la LSE et de la CCT - comme celles sur les salaires minimums et le temps de travail - ne sont pas respectées. De plus, à ce jour, ces «entreprises partenaires» d’Uber n’ont pas d’autorisation pour pratiquer la location de services. Unia attend des autorités compétentes qu’elles procèdent immédiatement à des contrôles dans toute la Suisse et qu’elles sanctionnent le comportement illégal d’Uber et de ses «partenaires».
Continuer à observer sans rien faire encourage les violations de la loi
La plupart des autorités suisses ont observé les agissements illégaux d’Uber pendant neuf ans. De nombreux politicien-ne-s ont défendu publiquement le travail au noir et l’ont encouragé sur le devant de la scène et en coulisses. Comme le montrent les «Uber Files», politicien-ne-s et autorités se sont laissé embrigader par les lobbyistes d’Uber sans jamais prêter attention aux revendications légitimes des salarié-e-s. Maintenant que toutes les questions pertinentes ont été clarifiées en dernière instance par le Tribunal fédéral, cela doit définitivement cesser. La politique et les autorités doivent veiller à ce que les lois et les CCT étendues soient appliquées. Si elles ne le font pas, elles approuvent et encouragent la violation délibérée de la loi par un groupe milliardaire ainsi que la spoliation systématique des travailleuses et travailleurs, et elles devront en assumer les conséquences politiques et juridiques.